Georges Martin
Georges Martin est né le 9 mai 1844, d’une famille solognote. ‑Son père était pharmacien, rue Mouffetard, à l’actuel no 3 de la rue de Bazeilles.
Georges Martin fit des études secondaires chez les Pères de la rue Lhomond. Son esprit, libre et indépendant, son intelligence vive lui valurent d’être considéré par ses maîtres comme un sujet dangereux et les Pères prédirent les pires catastrophes aux parents d’a jeune homme.
Reçu en 1801 au baccalauréat es lettres, Georges Martin échoua au baccalauréat ès sciences, aussi, son père mécontent, le mit-il élève pharmacien et lui cessa t il tout subside. Ce fut le meilleur moyen pour, décider Georges Martin à travailler sérieusement. Tout en travaillant pour gagner sa vie, il obtint, en 1863, son baccalauréat ès sciences, montrant ainsi aux Pères qu’il était capable de travailler et de réussir.
Georges Martin abandonna alors la pharmacie pour entreprendre ses études médicales et ce fut à cette époque que commença pour lui, la vie publique. Il se fit immédiatement le propagandiste des idées républicaines et fréquemment il prit la parole dans les réunions publiques et les t comités républicains.
L’ardeur et l’enthousiasme de la jeunesse lui firent quitter ses études en 1866 pour rejoindre Garibaldi dans la conquête de Vénétie. La guerre fut courte : après quelques semaines passées dans une ambulance, à Brescia, Georges Martin rentra en France par Gênes et Marseille et gagna Montpellier, où il fit sa 3° année d’études médicales.
Il quitta Montpellier à la fin de cette troisième année, après avoir remporté, au concours, le prix de troisième année, en 1867.
En octobre suivant, il reprit ses inscriptions à la Faculté de médecine de Paris et en mai 1870 il obtint son diplôme de docteur en médecine avec une thèse sur 1a circoncision qui lui valut d’être proclamé lauréat de cette Faculté. Son succès lui fut d’autant plus agréable qu’il lui permit de reprendre sas relations avec sa famille, à laquelle il avait prouvé que les Jésuites s’étaient trompés.
Malgré ces études de médecine, Georges Martin n’oubliait pas la propagande pour la République et il se faisait remarquer parai les étudiants dirigeant l’action républicaine au Quartier Latin et organisant des réunions souvent mouvementées dans les faubourgs ouvriers.
La guerre de 1870 trouva le jeune médecin, installé à Sceaux: au lendemain du désastre de Sedan et de la proclamation de la République, Georges Martin s’engagea comme aide-major. Affecté à l’ambulance du fort d’Issy, le jeune aide-major eut à faire un service des plus rudes et pendant les vingt-trois jours de bombardement il fit montre d’un sang-froid et d’un dévouement qui le firent aimer de tous.
La guerre terminée, Georges Martin se reposa en Sologne puis revint s’installer médecin dans sa maison natale de la rue Mouffetard. Très bon, très affable, aimé die sa clientèle, Georges Martin reprit son activité politique, et en 1874, le quartier de la Gare l’élut conseiller municipal à une énorme majorité : il avait su, malgré son jeune âge, 30 ans, conquérir l’estime et l’affection de ses compatriotes auxquels il ne ménageait ni sa peine, ni son argent, car jamais le jeune médecin n’envoyait de notes
Il attendait que l’on vint les lui réclamer et ainsi il lui arrivait souvent d’attendre longtemps !
II fut réélu quatre fois à des majorités de plus en plus fortes et en 1880, il cessa d’exercer la médecine pour se consacrer uniquement à. la vie publique.
Lorsque notre regretté F.*, vint prendre sa place dans la Haute Assemblée, il se trouva de beaucoup le plus jeune sénateur de France, il n’avait que 40 ans. I1 adhéra immédiatement à la gauche démocratique qui, si mes souvenirs sont exacts ne devait compter alors que huit membres !
Georges Martin gênait M. de Freycinet en réclamant ardemment pour Paris et la Seine la fin du régime d’exception que nous subissons encore actuellement. Aussi une intrigue ministérielle eut-elle pour résultat la non-réélection de notre F.*. en janvier 1890 Il refusa l’année suivante d’être candidat en disant que ses opinions et les électeurs n’ayant pas changé, il ne pouvait courir à un nouvel échec. Sollicité à nouveau quelques années plus tard (1894), il refusa d’être le concurrent de notre F.’. Charles Floquet, son ami.
Georges Martin se retira alors dans sa propriété de Lafargue qu’il ne quittait que pour des voyages à l’étranger et il était bien résolu à rester éloigné des affaires publiques, lorsqu’en août 1897 des amis vinrent le solliciter de se présenter au Conseil général dans le canton de Lamotte-Beuvron, Il fut élu au premier tour de scrutin et réélu jusqu’à sa mort.
Cédant aux instances de ses amis, Georges Martin se présenta sans succès à quatre reprises aux élections législatives en Loir-et-Cher. Chaque fois la coalition modérée-droite fit échec à l’homme de progrès et assura l’élection de son concurrent. C’est que Georges Martin était fier d’être franc-maçon et vous voyez d’ici le parti qu’en tiraient ses adversaires.
A cette époque ; toute l’activité de notre F.’. Georges Martin était absorbée par le « Droit Humain » qu’il avait fondé en avril 1893, avec S..’, Maria Deraismes. Et c’est à notre Obédience seule que devaient aller tous ses efforts jusqu’à sa mort. La guerre, la fin rapide de notre G.’. M.’. avaient vivement frappé notre F.’. et ses forces déclinèrent peu à peu : le 1°octobre 1916 il nous quitta pour la Grande Loge Eternelle.
Lors de ses obsèques célébrées dans ce Temple des voix autorisées vinrent rendre un dernier hommage à notre Fondateur, à cet homme de bien qui n’eut dans sa vie d’autre but que de collaborer à l’organisation d’une Société meilleure. Franc, loyal, honnête homme, Georges Martin fit partie de la génération des hommes politiques pour qui le Veau d’or n’était pas un Dieu. Toute sa vie publique montre une haine profonde du despotisme, un grand altruisme, une conscience vraiment républicaine, acharnée au succès des revendications sociales. Ses adversaires eux-mêmes rendaient justice à son honnêteté et sa franchise.
Une année, appelé à présider, comme doyen d’âge, l’ouverture de la session du Conseil Général du Loir-et-Cher : il refusa, pressé de donner les motifs, il n’hésita pas à dire au président sortant que ne pensant aucun bien de lui, il ne voulait pas, en ouvrant la séance, être obligé de lui adresser force compliments ; inutile de vous dire que l’insistance cessa immédiatement et que l’on chercha un autre président.
Incapable de tromper, notre F.’. fondateur fut souvent la victime de sa confiance : il jugeait les autres d’après lui-même et, lorsqu’on lui faisait remarquer sa trop grande confiance
Il répondait invariablement qu’il valait mieux être trompé que de tromper.
Jamais personne ne fit, en vain, appel à son bon cœur, à sa générosité : tous ceux qui l’ont connu se souviennent avec quelle affabilité il recevait tous ceux qui s’adressaient à lui. Ils se rappellent aussi combien sa figure douce et bonne inspirait immédiatement la confiance.
Ce travail serait incomplet si nous n’étudions l’oeuvre de notre F.’. et rien ne la caractérise mieux à notre avis que cet hommage de notre S.’. Marie Bonnevial : « Aussi pouvait-il dire avec. Térence je suis un homme et rien dû ce qui est humain ne saurait m’être étranger. »
Son oeuvre est toute de désintéressement en politique, il intervint dans de nombreuses questions.
Au Conseil Municipal et plus tard, au Sénat, il réclama le droit municipal pour Paris et le droit départemental pour la Seine. Son discours de juillet 1884, en prenant possession du fauteuil présidentiel précise son opinion :
« Nous devrons revendiquer énergiquement le droit commun peur le département de la Seine, assujetti encore aujourd’hui à un régime de défiance, qui entrave à chaque instant l’exercice de notre mandat, au grand détriment des intérêts matériels et moraux qui nous sont confiés .
« Le suffrage des électeurs du département die la Seine n’a pas la même valeur que celui des autres électeurs français, puisqu’il donne à l’élu des droits moins étendus. On peut donc dire qu’en se fixant dans le département de la Seine, un citoyen, fut-il le Président de la République, perd une partie de la puissance électorale qu’il possédait auparavant.
« Nous devrons défendre jusqu’à la dernière parcelle de nos droits et user du mandat que nous avons reçu jusqu’aux extrêmes limites légales, afin d’amener le législateur à s’occuper de ces deux questions dont la solution est impérieusement réclamée par nos mandants : les Droits de Paris et les Droit du Département de la Seine. »
Dès son arrivée au Sénat, notre F.’. déposa une proposition de loi donnant satisfaction aux revendications de Paris et de la Seine. La proposition fut prise en considération à une voix de majorité et Georges Martin fut nommé rapporteur, mais son rapport fut repoussé en mars 1888, malgré un avis favorable du F.’. Charles Floquet, alors Ministre de l’Intérieur
Constatons, en passant, que Paris n’a pas encore obtenu entière satisfaction et que nous sommes encore, nous, Parisiens, des citoyens amoindris.
Mais c’est surtout vers l’assistance aux enfants, infirmes et vieillards, que son bon cœur le conduisit : l’amélioration du sort de tous ceux qui souffrent trouva toujours en lui un défenseur aussi ardent que convaincu.
Dès 1876, dans un mémoire au Conseil Municipal sur le projet de budget des Bureaux de bienfaisance il affirmait ainsi ses idées :
« Du jour où l’enfant vient au monde, par le seul fait de sa naissance, il acquiert le droit de vivre, et la Société au milieu de laquelle il est né lui doit non seulement aide et protection, triais encore elle doit le nourrir et l’instruire jusqu’à l’adolescence, si les parents ne sont pas en état de le faire eux-mêmes.
« Une démocratie bien organisée doit aider les veufs ou les veuves qui ne peuvent pas arriver par leur travail à élever leurs enfants .
« La Société a le devoir de remplacer la famille lorsqu’elle n’existe pas, au lorsque les parents sont incapables de faire le nécessaire pour les enfants et les infirmes ».
« Le mutilé de l’industrie a droit à une réparation en cas d’accident ou à une pension si ses blessures le rendent inapte au travail pour toute sa vie ».
« Lorsque l’homme a travaillé toute sa vie et que l’age le rend inapte au travail, la société doit assurer son existence, si ses enfants ne peuvent pas le faire ».
« La femme a non seulement les mômes droits que l’homme, mais de plus grands encore, elle dont le salaire, dans notre Société mal équilibrée, est moins rémunérateur que celui de l’homme. »
Les fous, disait Georges Martin, sont l’objet d’une préoccupation spéciale de la part du législateur qui les craint et il expliquait ainsi le désintéressement dé la Société à l’égard des faibles.
« La Société n’ayant rien à craindre de l’enfant, de l’infirme et du vieillard, les laisse mourir de faim.»
Les améliorations sociales réclamées immédiatement par notre F.*. Georges Martin étaient ainsi nettement exprimées et dès son arrivée au Sénat il s’efforça de les faire réaliser.
Membre du Conseil de surveillance de l’Assistance publique, il prépara la réorganisation des Bureaux de bienfaisance de Paris et dans ses rapports de 1876 et 1878, il proclamait la nécessité de la laïcisation des services hospitaliers.
Membre du Conseil supérieur de l’Assistance publique, Georges Martin participa très activement à l’élaboration du projet de l’Assistance médicale dans les campagnes (1898) au projet d’assistance aux vieillards, âgés, infirmes et incurables. Il fit plus de 2.000 conférences sur ce sujet.
En 1876, au Conseil Municipal, il réclama le vote d’une loi sur les accidents du travail. Comme vous l’avez vu tout à l’heure, il eut la satisfaction d’être plus tard, comme sénateur, membre de la Commission qui élabora la loi. Il réclamait, en même temps, l’octroi de secours aux filles-mères, et il put voir cette réforme bien imparfaitement organisée avant sa mort.
Au Sénat, notre F.’. intervint activement en faveur de la laïcité de l’Enseignement, il fit voter l’article. relatif à l’inspection médicale des écoles, lors du vote de la loi sur l’organisation de l’enseignement. Lors du vote de loi sur l’organisation de la Caisse Nationale des Retraites, notre F.’. Georges Martin, réclama l’organisation de Caisses communales de retraite, véritable embryon des assurances sociales que nous demandons encore, et il fit voter un article permettant aux Sociétés de Secours mutuels d’organiser la retraite pour la vieillesse.
C’est qu’en effet. notre F.’. était un mutualiste convaincu et la Mutualité eut toujours, en lui, non seulement un conférencier actif – il fit sur ce sujet plusieurs centaines de conférences dans toute la France – mais aussi un réaliste qui s’efforçait au pouvoir de faire adopter les solutions préconisées. L’œuvre politique de notre F.’. fut si importante qu’en 1905 encore, c’est-à-dire plus de vingt ans après qu’il eût quitté l’assemblée communale de Paris, Desplas, président die; cette assemblée et Lampué, ancien président du Conseil Municipal, rendaient hommage aux travaux de notre F.’. et à son activité qui fut bienfaisante
Mais là ne s’arrête pas le travail de notre F.’. : il avait été profondément choqué de voir la situation inférieure de la femme et profondément convaincu de l’injustice commise, vis-à-vis de la moitié au moins de l’Humanité, il fut, dès sa jeunesse, un ardent féministe et toutes les sociétés d’alors, organisées en faveur de l’émancipation de la femme, le comptèrent parmi leurs premiers membres. Il aimait à dire les raisons premières qui l’avaient convaincu :
« Je n’ai jamais compris pourquoi ma mère, à qui je dois d’exister, qui m’a élevé, qui a fait mon éducation, à qui je dois d’être ce que je suis, qui avait, à l’époque de ma majorité civile et politique, vingt-et-une années d’expérience de plus que moi, était mineure alors que j’étais majeur, simplement parce que j’étais homme ».
« Ma mère, mise en fait par la loi au même rang que les enfants ou que les hommes qui ont perdu leurs droits à la suite de condamnations infamantes, a toujours été pour moi une raison de révolte contre cette infamie de la loi et d’antipathie pour ceux des autres hommes, qui, à mon encontre, trouvent cela tout naturel ».
« Ce que ma raison réprouve, lorsqu’il s’agit de ma mère, elle le réprouve non moins quand il s’agit de ma femme, de celle que j’ai choisie comme compagne de ma vie, qui partage mes joies, mais aussi mes peines ; elle le réprouve enfin, qu’il s’agisse de ma sueur ou de n’importe quelle femme.
Au Sénat, notre F.’. Georges Martin déposa un projet de loi tendant à améliorer la condition de la femme et il demanda pour elle le droit d’être témoin dans les actes de mariage, actes de naissance, déclaration de naissance, déclaration de décès, actes notariés.
Mais notre F.’. voulut faire mieux encore pour la femme : il voulut l’armer pour la défense de ses droits et lui fournir les moyens de jouer dans la vie le rôle qui lui appartient. Initié le 21 mars 1879 à la Loge écossaise « Union et Bienfaisance » , notre F.’. Georges Martin avait compris le rôle important de la Maç.’. et il était pleinement convaincu que la femme ne serait vraiment apte à remplir sa tâche que le jour où elle aurait accès dans nos temples, que le jour où elle aurait reçu l’init.’. maç.’.. Il entreprit donc une vaste campagne dans la Maçonnerie, fit de nombreuses conférences en faveur de l’admission de la Femme dans la Maç.*. ; il obtint de nombreux encouragements mais les promesses ne se réalisaient jamais. Un moment, il avait espéré réussir, lors de la fondation de la Grande Loge Symbolique Ecossaise, mais il se rendit vite compte que ses espoirs étaient vains. C’est alors qu’il comprit la nécessité de créer une Obédience mixte, afin de convaincre les hésitants et de prouver aux adversaires qu’ils étaient dans l’erreur. Depuis de longues années déjà, il était en relations avec notre S.’. Maria Deraismes dont il avait suivi les campagnes courageuses et à l’initiation régulière de qui il avait assisté à la L.’. Les Libres Penseurs de l’Or.’. du Pecq.
Ils tombèrent d’accord pour créer l’Ob.’. Mixte et le 4 avril 1833, la S,’, Maria Deraismes initiait les seize SS.’. fondatrices du « Droit Humain » et proclamait l’affiliation du F.’. Georges Martin à l’Ob\.’.naissante.
Notre S.’. Maria Deraismes n’eut pas la joie. de voir grandir son oeuvre : quelques mois après la fondation; elle partait pour la G.’.L.’.E.’.. La charge de l’organisation de la nouvelle Ob.’. retomba entièrement sur notre F.’. Georges Martin et, de 1893 à 1916, sa vie entière fut en majeure partie consacrée au « Droit Humain ».
Il faut avoir vécu dans l’intimité de nos fondateurs pour savoir quelle foi profonde, les animait, pour connaître la somme de travail qu’ils ont fourni. Si vous aviez eu, comme nous, cette joie vous comprendriez vite pourquoi leur mémoire nous est si chère et pourquoi nous saisissons toutes les occasions pour vous faire partager notre culte.
Grâce aux efforts constants de notre F.’. Georges Martin, grâce à la collaboration de notre regrettée G.’. M.’. S.’. Marie Georges Martin, grâce à l’aide qu’ils rencontrèrent chez nos FF\.’.et SS.’. Corneille Kahn Marie Bonnevial, Clémence Royer, Maria Martin, l’Ob.*. s’est imposée au monde maç.’. mais sans crainte d’un démenti, nous pouvons affirmer que c’est avant tout à Georges Martin que l’Ob.*. , le doit : il consacra non seulement son temps, son activité, mais aussi sa fortune. Il était né riche, il est. mort pauvre après avoir dépensé plusieurs centaines de mille francs pour 1e « Droit Humain ». C’est à lui et à lui seul que nous devons ce Temps*. dont nous sommes si fiers : il était persuadé que le « Droit Humain » devait être chez lui et la fin de sa vie fut occupée à la réalisation de ce désir. Il sacrifia pour cela son hôtel de la rue Vauquelin et nos FF.’. et SS.’. qui ont connu ce bijou peuvent comprendre le sacrifice accompli : cet hôtel avait été le don die sa mère, lors de son mariage, il y avait passé sa vie dans le confort et le luxe et, à la fin de son existence il quittait tous ces souvenirs pour venir s’installer ici dans un appartement de quatre pièces ! Il sacrifia ensuite sa propriété de Lafarge pour finir de payer les entrepreneurs. II faut une âme profondément convaincue pour consentir à de tels sacrifices pour l’Idée.
Le « Droit Humain », tel était le leitmotiv de notre F.’. fondateur et tous ses derniers instants furent absorbés par le souci de ne pas voir son œuvre sombrer : il sentait ses propres forces décliner et nous étions au milieu de la tourmente, les meilleurs ouvriers étaient dispersés. Je le revois, le matin même de sa mort, dans son salon, très faible, il avait, voulu se lever quand même et les quelques paroles qu’il put prononcer furent pour nous demander de soutenir le « Droit Humain ». Spectacle bien attendrissant, je vous assure, que ce vieillard qui, se sentant près de mourir, n’avait d’autre souci que de soutenir l’œuvre à laquelle il avait voué sa vie.
Malgré tous les efforts consacrés au. « Droit Humain », notre F.’. Georges Martin n’avais jamais oublié qu’il avait reçu la lumière au Rite Ecossais et, après avoir été Ven .’. de la Jérusalem Ecossaise, pendant de nombreuses années, il avait fondé, en 1911, la L.’. La Fraternité Ecossaise à l’Or .’. de Nice, la L.’. Denis Papin, en 1912, à l’Or.’. de Blois, la L.’. Les Philanthropes du Maine, à l’Or.’. du Mans, en 1913.
Nous pouvons donc affirmer que la vie de notre F,’, Georges Martin fut particulièrement bien remplie : nous devons en tirer de précieux enseignements. Sa vie est un exemple de dévouement à la cause des faibles et, plus d’une fois, il apparut pour cela comme un révolutionnaire. Sa vie est. aussi un exemple de dévouement à l’Idée ; sans crainte des sarcasmes, des moqueries, dies embûches pour ne pas dire plus, il suivit la voie qu’il s’était tracée et il ne s’en écarta pas.
Malgré cette activité débordante, malgré, ces luttes continuelles, malgré les multiples obligations de la vie, notre F.:. Georges Martin trouvait encore le temps de s’intéresser à. la philosophie et dans une brochure publiée en 1912, il synthétisa sa conception philosophique. Il admet comme base la substance unique, origine de tout ce qui existe dans l’Univers et à cette substance unique, il donne la propriété d’être non seulement force et matière, mais aussi esprit.
Pour lui « l’âme, anima ‘des Latins la vie, le souffle est un Mot qui, pour les biologistes, exprime l’ensemble des fonctions du cerveau, de l’innervation encéphalique, le côté esprit de l’individualité animale.
L’âme vient donc de la propriété esprit que possède la substance unique ; l’âme naît quand l’Etre Humain prend vie et disparaît à la Mort, la substance unique retrouvant alors les éléments constitutifs de l’Etre.
Notre F\.’. Georges Martin admettait ainsi que « c’est l’âme qui permet aux animaux de percevoir les objets extérieurs et de ressentir les sensations intérieures, d’éprouver les besoins et de subir les penchants. »
Ainsi, « il n’y pas d’esprit sans force et matière », et « très rudimentaire chez les animaux inférieurs l’âme est de plus en plus développée suivant le degré de perfection organique de l’animal ».
Il ne peut exister, dit-il, de corps vivant sans âme, non plus que d’âme sans corps, ils se complètent dans l’Etre humain en vie comme clans tous les animaux aussi en vie.
« Lorsque l’embryon humain est devenu fœtus, qu’il a toutes les formes corporelles et tous les organes de l’espèce humaine, qu’il est complètement développé, il naît sans âme et n’en acquière une que lorsqu’il a respiré ; seulement alors il a sa vie propre et possède par conséquent sa personnalité ».
Cette conception amène naturellement notre F.’. à admettre que :
« Dieu, Etre suprême préexistant, pensant, raisonnant, créant, dirigeant, conservant, transformant ce qu’il a créé ;
Créateur et conservateur par conséquent de l’Univers, qui a présidé et présidera aux transformations variées et éternelles de la substance contenue dans Ether cosmique ;
Force qui maintient l’équilibre de la substance unique art matière disséminée à travers l’espace infini, qui met en règle le mouvement et l’évolution ;
Est une conception de l’imagination humaine.
Pour que Dieu existe, il faudrait en effet, l’Univers étant infini, que lui-même soit plus que l’infini de l’Éther Cosmique et que la substance force et matière qui occupe l’espace infini ou, qu’il soit cette substance, force et matière elle-même.
L’exposé de ces conceptions conduit notre F.’. Georges Martin à. la conclusion suivante :
« A celui qui croit qu’après sa mort son âme ira vivre un bonheur éternel près de Dieu et ‘des ancêtres remontant à toute éternité passée, et des descendants qui viendront la rejoindre de génération nouvelle. en génération nouvelle, toujours et pendant toute l’éternité future, je dis : croyez cela si vous y trouvez votre satisfaction morale mais nombreux sont ceux qui ne peuvent .Pas accepter cette croyance parce qu’elle ne satisfait pas la raison, étant contraire à la loi naturelle universelle de la substance primaire unique qui emplit l’Éther cosmique, commencement et fin de tout ».
« A ceux qui croient que depuis toute éternité leur âme est déjà venue de survivances en survivances résider sur la Terre un plus ou moins grand nombre de fois dans les corps d’Etres humains, et que pendant toute l’éternité elle continuera à y revenir, je dis : la loi de la substance unique qui est la vérité scientifique est plus simple à expliquer que votre conception ».
« Lorsque les humains auront reconnu et adopté la vérité scientifique au lieu de cultiver leurs multiples erreurs, causes de leurs divisions et de leurs discussions, alors seulement ils pourront comprendre qu’ils peuvent avoir le bonheur sur la Terre et que c’est d’eux et d’eux seuls qu’il dépend de se le procurer, qu’ils n’ont pas besoin de le rechercher dans une vie future qu’ils ne vivront jamais, parce qu’elle n’existe pas, et ils travailleront unis fraternellement en vue d’assurer leur bien-être matériel et moral â tous, sur notre Planète et non ailleurs »
Et c’est profondément persuadé de ces idées que notre F.’. Georges Martin a sa vie durant, travaillé au bonheur de ceux qui souffrent, qu’il a recherché partout et toujours les moyens de rendre cette vie moins pénible, qu’il s’est efforcé de rapprocher les Etres Humains de tous les pays en donnant au Droit Humain son caractère vraiment international.
Inspirons-nous donc de son exemple et que l’étude de sa vie nous communique sa Foi profonde dans l’avènement du « Droit Humain » dans l’avènement d’un monde meilleur à la réalisation duquel doivent tendre tous nos efforts.